Du jeune au stagiaire
Jusqu'à la parution de l'AR du 21 septembre 2004 relatif à la protection des stagiaires (MB du 4 octobre 2004), c'est la législation sur les jeunes au travail (AR du 3 mai 1999, MB du 3 juin 1999) qui s'appliquait aux stagiaires. Mais si, suite à l'AR de 2004, les stagiaires sont sortis du champ d'application de la législation Jeunes au travail, les ponts entre les deux réglementations n'ont pas été coupés pour autant: les dispositions sur les stagiaires font régulièrement référence à la réglementation générale applicable aux jeunes.
En 2017 est parue la version coordonnée du Code du bien-être au travail. Tous les anciens AR ont été abrogés, y compris ceux qui concernaient spécifiquement les jeunes et les stagiaires. Ces dispositions sont désormais rassemblées dans le LIvre X Organisation du travail et catégories spécifiques de travailleurs du Code du bien-être au travail. Le Titre 3 concerne les jeunes au travail et le Titre 4 a trait aux stagiaires. La coordination de la législation n'a pas entraîné de modifications de contenu.
Champ d'application Un stagiaire = tout élève ou étudiant qui, dans le cadre d’un programme de l’enseignement organisé par un établissement d’enseignement, exerce effectivement un travail chez un employeur, dans des conditions similaires que les travailleurs occupés par cet employeur, en vue d’acquérir une expérience professionnelle
(art. X.4-2)
Un jeune
= travailleur de 15 ans ou plus non soumis à l'obligation scolaire à temps plein
= apprenti bénéficiant d'une formation en entreprise dans le cadre d'un contrat d'apprentissage (quel que soit l'âge)
= étudiant-travailleur (quel que soit l'âge)
= élève dont le programme d'études prévoit une forme de travail dans l'établissement d'enseignement (art. X.3-2)
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Stagiaire?
Le Code définit le stagiaire comme "tout élève ou étudiant qui, dans le cadre d’un programme de l’enseignement organisé par un établissement d’enseignement, exerce effectivement un travail chez un employeur, dans des conditions similaires que les travailleurs occupés par cet employeur, en vue d’acquérir une expérience professionnelle" (art. X.4-2). Les conditions dans lesquelles travaille le stagiaire sont donc similaires à celles des travailleurs ordinaires. La définition précise aussi que seules les activités de stage où le stagiaire fournit effectivement des prestations chez l’employeur sont prises en considération: la réglementation ne s'applique pas donc pas aux stages d’observation (puisque dans ce cas le stagiaire regarde comment est fait le travail, mais n’effectue pas de travail lui-même) ni aux visites d’entreprise et autres activités similaires.
Identifier les risques
L'analyse de risques est une des principales obligations de l'employeur. Les dispositions du Titre X.4 Stagiaires ne donnent pas cependant pas de détails sur la manière d'effectuer cette analyse. Elles renvoient simplement aux dispositions contenues dans le Titre X.3 Jeunes (article X.3-3).
Le but de cette analyse est de déterminer les mesures à prendre ainsi que la surveillance de santé adéquate. Elle doit en outre tenir compte des caractéristiques spécifiques des stagiaires, telles que le manque d'expérience, l’absence de conscience des risques ou l'inachèvement du développement. Dans tous les cas, l'analyse doit vérifier si le stagiaire n'est pas exposé à des activités à risques. Pour les agents, activités, procédés et lieux à risques, la législation renvoie à l'art. X.3-8 et à l'annexe X.3-1. Cette annexe dresse la liste des activités auxquels les jeunes (et donc aussi les stagiaires dans ce cas) ne peuvent être exposés.
Cette analyse doit avoir lieu avant que les stagiaires ne commencent leur travail et doit être renouvelée au moins une fois par an, ainsi que lors de chaque changement important de poste de travail. Elle doit être modifiée si nécessaire.
L’analyse des risques doit en principe être réalisée par l’employeur. Ce dernier peut, pour ce faire, s'adresser à son service de prévention et de protection au travail. Cependant, les indépendants sans travailleurs qui accueillent un stagaire peuvent éventuellement faire appel au service PPT de l’établissement d’enseignement du stagiaire. L'employeur doit communiquer les résultats de l'analyse des risques à l'établissement d'enseignement.
Interdictions
L’employeur prend les mesures de prévention pour la protection de la santé et de la sécurité des stagiaire sur base des résultats de l’analyse des risques. Ces mesures consistent dans tous les cas à interdire les activités à risques, accueillir et accompagner le stagiaire et assurer la surveillance de la santé.
Les stagiaires ne peuvent donc être exposés à des activités à risque ou spécialement dangereuses pour eux, comme le travail dans le froid ou la chaleur extrême, par exemple.
Il existe cependant une exception: les activités dangereuses nécessaires pour les préparer à leur profession. Ils pourront effectuer ces activités à risques pendant le stage, à condition que l’employeur s’assure que les mesures de prévention sont prises, qu'un membre de la ligne hiérarchique contrôle leur application et que ces activités se déroulent toujours en présence d’un travailleur expérimenté.
Surveillance de santé
La surveillance de santé est également une mesure de prévention importante. C'est aussi le volet qui a subi le plus de modifications. En effet, l'organisation de la surveillance de santé par l'employeur impliquait pour ce dernier des charges (notamment financières) non négligeables, ce qui comportait le risque de voir les offres de stage se réduire. Les différentes modifications apportées à la législation ont abouti, d'une part, à ce que la surveillance de santé ne soit plus toujours obligatoire (dispenses) et, d'autre part, à ce qu'elle puisse être prise en charge par l'établissement d'enseignement.
A quel moment?
La surveillance de santé est exigée en fonction du type d’activités exercées ou du statut même du stagiaire. Dans le premier cas, ce sont les dispositions du Titre I.4 Surveillance de santé qui s'appliquent. On peut les résumer en disant que la surveillance de santé est également exigée pour les stagiaires lorsqu'ils sont exposés à des risques pour lesquels les travailleurs ordinaires de l'entreprise sont eux-mêmes soumis à la surveillance de santé.
Dans le second cas, la surveillance de santé résulte de son statut spécifique. C'est le cas si le stagiaire
- n'a pas encore atteint l’âge de 18 ans
- effectue du travail de nuit
- est exposé, dans le cadre des dispenses, à des risques graves en principe interdits.
Dans certains cas, la surveillance de santé des stagiaires n'est pas exigée. Les stagiaires qui n'ont pas encore 18 ans et qui ne sont pas exposés à d'autres risques (que l'âge lui-même) sont dispensés de la surveillance de santé. Ils doivent toutefois disposer d'une attestation délivrée dans le cadre de la surveillance médicale scolaire.
En règle générale, seule une évaluation de santé préalable existe pour les stagiaires. Ni l'examen périodique, ni l’examen de reprise du travail, ni la surveillance de santé prolongée ne sont d’application. Le médecin du travail peut cependant décider de compléter l'évaluation de santé préalable par une évaluation de santé périodique si le stage a une durée de plus de 6 mois et si le stagiaire est exposé aux risques figurant dans l'annexe X.3-1.
Qui organise la surveillance de santé?
C’est l’employeur chez qui le stagiaire est occupé en premier lieu qui doit effectuer la surveillance de santé (évaluation de santé préalable). Les employeurs suivants sont dispensés de l’exécution d’une nouvelle évaluation de santé, pour autant que le stagiaire ne soit pas exposé à un nouveau ou à un autre risque. Si l’employeur chez qui le stagiaire était occupé en premier lieu n’a pas fait exécuter cette évaluation de santé, c'est l’employeur suivant qui doit le faire (art. X.4-7).
La surveillance de santé des stagiaires est en principe réalisée par le médecin du travail de l’employeur. Le médecin du travail de l’établissement d’enseignement (service interne ou externe) peut aussi s'en charger mais cet élément doit être repris dans le contrat de stage conclu entre l'établissement d'enseignement du stagiaire et l’employeur.
En outre, l’employeur doit au préalable informer l’établissement d’enseignement des résultats de l’analyse des risques et fournir les coordonnées de son médecin du travail. Après l'examen, le médecin du travail de l'établissement d'enseignement remet un exemplaire du formulaire d’évaluation de santé à cet établissement, qui en fait suivre la copie auprès du stagiaire et de l'employeur.
Qui paie la surveillance de santé?
Si l’employeur organise lui-même la surveillance de la santé, il en assume les coûts. Le tarif est le même que celui qui s'applique aux autres travailleurs, y compris les coûts liés à l'analyse des risques et à la surveillance de la santé. Aucun remboursement n'est prévu.
Si l’employeur fait appel au service de prévention (externe) de l’établissement d’enseignement, un tarif spécifique de €61,13 (indexé) s'applique. Ce montant, entièrement pris en charge par Fedris, ne couvre toutefois pas les prestations techniques supplémentaires, qui restent à charge de l’employeur. Il peut s'agir p.ex. de coûts liés à des examens supplémentaires réalisés dans le cadre de l'exposition aux agents chimiques.
Et l'établissement d'enseignement?
Le Titre X.4 Stagiaires comporte surtout des obligations pour l'employeur. L'établissement a cependant aussi un rôle important à jouer. Ainsi, il est soumis à l'obligation générale d'assurer coordination et soutien. En outre, si le stagiaire effectue une activité similaire dans l'établissement d'enseignement et dans l'entreprise, l'établissement d'enseignement peut reprendre certaines obligations de l'employeur. Dans ce cas, c'est l'établissement d'enseignement qui se charge de l'analyse des risques et qui détermine les mesures de prévention. Il communique à l'employeur les résultats de l'analyse des risques et les mesures de prévention prises. Enfin, dans ce cas, il s'occupe également de la surveillance de santé (art. X.4-14 - X.4-15).
Echange d'information
La protection des stagiaires concerne des parties aussi diverses que l'établissement d'enseignement, l'employeur, le médecin du travail, le stagiaire lui-même. Il est donc évident que l'échange d'information est essentiel pour que la prévention soit efficace. Le législateur en a tenu compte. Ainsi, l'employeur doit préciser à l’établissement d’enseignement si une surveillance de santé est nécessaire et laquelle. Cette information est basée sur les résultats de l’analyse des risques. Si une surveillance de santé doit être organisée, il devra également établir un document comprenant les informations sur le poste de travail (voir encadré).
La législation ne peut cependant tout régir: une grande part de l'efficacité de la communication repose sur la bonne volonté et l'implication de chacun.
Document d'information sur le poste de travail (fiche de poste de travail)
(=> à établir en cas de surveillance de santé)
- description du poste ou de l'activité;
- mesures de prévention à appliquer;
- nature des risques;
- obligations que le stagiaire doit respecter et éventuellement, formation requise.
(art. X.4-5) |